"Il y a quelques minutes, j'aurai pu vous écrire le "Manifeste à destination des grands cons du XXIème siècle", mais après les cinq minutes de priorité de la journée, tout va mieux. Aujourd'hui, c'est ce que le commun des mortels appellerait une "journée de merde", une "journée sans", ou une "journée où tu sais ça n'allait pas trop".
Ce matin, une camarade de classe a trouvé le mot. Aujourd'hui, nous nous sentions désarmés. Une multitude de jeunes cons désarmés entrèrent alors en cours de mathS. (Le S c'est pour ma Zoé, elle qui m'apporte tant de sourires et qui me manque tant).
Aujourd'hui, je me trouve être terriblement en colère contre des tas de gens, qui par ma foi (par ma foi c'est pour Christophe, toi même tu sais), donc en colère contre des tas de gens, qui par ma foi, n'avaient pas fait grand chose pour m'énerver. Il y a des jours comme ça, c'était une "journée de merde", un "jour sans" quoi.
Je manque d'air en ce moment, mes poumons ne se remplissent plus, ma gorge et mes clavicules ne se remplissent plus. Je n'ai plus d'air. Peut être que je vais mourir bientôt ? Qui sait. Dieu, s'il existe. Donc je n'ai plus d'air. Je suis perdu dans un grand labyrinthe sombre et glauque. Je ne sais plus ou me positionner par rapport à ce que j'appelais il y a quelques temps encore ma passion. C'est un mot qui m'est devenu étranger, du moins dans ce sens là. Je connais une autre passion, bien plus intime, secrète, tendre et sensuelle. Et donc l'ancienne, de passion, c'était ce pour quoi mon corps se levait tous les matins dans cette ville avec un grand port. C'était ce que j'attendais toute la matinée en gigotant sur mon siège, en tripotant mes stylos. "Mademoiselle P., voudriez vous bien tenir en place s'il vous plait ?". Et donc enfin venait l'heure H, celle que j'attendais tant. Et quand j'y étais, je serrai les dents. Et ça me plaisait. J'aimais me faire engueuler, je me disais que la vie serait tout le temps belle comme ça. Et la vie l'était, belle, parce que même quand on me traitait de grosse vache ("Mais ma fille, tu ne seras jamais D., tu n'es qu'une grosse vache"), ça ne me faisait rien. Je pouvais mourir pour mon art.
Et ensuite, les choses ont changé. Elles ont changé, parce qu'entre temps, j'ai grandi, et que mon corps s'est confronté aux humains, aux vraies choses de la vie, celles qui remplissent la planète et font mourir les gens de tristesse. Alors pour ne pas devenir une "fille-qui-met-du-verre-dans-les-pointes-des-autres-juste-comme-ça", je suis partie. Je suis morte une première fois.
Ensuite, je suis née de nouveau. J'ai recommencé à y croire de toutes mes forces. Et là, cette multitude d'adultes qui n'ont rien réussi dans leur vie sont venu briser la mienne, en prenant mes rêves et en les transformant en bouts de papier minuscules qui serviront à faire une bouteille en plastique. Sympa comme avenir.
Et là, je meurs encore. Je suis en train de mourir une deuxième fois, je n'ai plus d'air. Au secours !
Excusez moi, la priorité de la journée m'appelle."